Alec a écrit:
c'est le seul de la saga qui m'a laissé cette impression de "gros big mac dégoulinant" qu'on vous force à avaler, c'est dommage !
On est d'accord, tout ce que tu as décrit, ça me semble "dommage" (néanmoins, du point de vue de Kojima, la simple idée d'une suite à MGS2, c'était "dommage"). On pourrait même dire que MGS4, c'est du gâchis. Mais au final, ça me semble surtout voulu.
Tous les exemples que tu as cités (et bien plus encore ! tu as oublié le face-à-face entre Raiden et le navire, l'épilogue façon "maison de retraite", etc.), oui, c'est du grand guignol. Le simple fait de booter ce jeu, ça revient à s'exposer à quelque chose d'absurde : l'aventure d'un vieillard moustachu au royaume de la nostalgie stérile (ce serait pas mal, tiens, comme slogan derrière la jaquette du jeu).
… Et dire que cette aventure débute par une série de spots publicitaires débiles ! Ils entament déjà la crédibilité du jeu, avant même qu'il ait commencé (et ils ont sûrement pompé d'importantes ressources de développement qui auraient pu être investies dans autre chose).
Dans MGS 1, 2 et 3, dès qu'on lance une nouvelle partie, les premiers instants sont splendides : des plans de ouf, qui mettent tout de suite dans l'ambiance, avec un sous-marin en Alaska, New York sous la pluie, un saut en parachute dans la jungle... Ll'écran noir avec la réplique de David Hayter, dans MGS 2 et 3, c'est la définition du "cool", ça fait naître une petite voix dans la tête du joueur, qui se dit "héhéhé, alors ça, ça va dépoter !".
Mais dans MGS4, dès qu'on lance une nouvelle partie, on se retrouve, comme tu l'as dit, avec "un bon gros Big Mac, bien dégoulinant de partout" (j'en rajoute volontairement). Au lieu d'une mise en scène trop cool, Kojima nous sert, en guise d'apéritif, ce qu'on pourrait voir de pire à la télé, de la "junk TV" à 200% (dont la télé elle-même ne voudrait pas ?). Ça fait naître une petite voix dans la tête du joueur, qui se dit "ok, sympa, mais il est où le jeu", ou carrément : "eh merde… j'ai pas payé pour ça… elle est où, la base que je dois infiltrer ?".
C'est la débauche du ridicule, ça préfigure le reste du jeu… Mais il NE peut PAS y avoir aucune raison derrière ça. C'est juste impossible. Ce n'est pas un "fail" (ça le serait, si Kojima avait vraiment tenté de faire un chef-d'œuvre inoubliable qui mettrait d'accord toute l'humanité, mais dès les premières secondes, on voit bien que non, que c'est limite le contraire).
Alors, libre à chacun de dire que Kojima a juste commis une vulgaire bouse. L'équivalent de la malbouffe appliqué au jeu vidéo. Mais libre à chacun, aussi, de se poser des questions sur ça.
Pour moi, l'absurdité (extrême) du jeu force le joueur à exercer son esprit critique, à questionner ce qu'on lui donne, à ne pas tout prendre au pied de la lettre. A voir plus loin que les pixels. C'est ce que Kojima avait déjà prévu avec MGS2 (avec beaucoup plus de finesse).
Peut-être même, qui sait… que l'absurdité de MGS4 force le joueur à faire ses propres interprétations du jeu ? C'est le principe de base du postmodernisme : "je voudrais juste kiffer cette œuvre, ne plus penser à rien d'autre, mais cet abruti d'auteur n'arrête pas de m'en empêcher ! C'est quoi son problème ? … Ah, OK, peut-être qu'il a voulu dire ça, en me montrant ça…". Etc, etc.
"Grrr... Je voudrais juste infiltrer des bases, mais y'a des cinématiques bizarres qui m'en empêchent !"Et tant pis si l'interprétation du joueur aboutit sur : "Non, Hideo, ça ne fonctionne pas, je ne pense pas que ce soit très intelligent, ce que tu as fait". Kojima a pris ce risque.
(Juste pour que ce soit clair, ceci n'a rien d'un sermon, d'un "conseil d'utilisation" ou quoi que ce soit du genre. J'explique juste comment je perçois le jeu, et je donne ma réponse à la question du topic. Il y en a pour tous les goûts dans MGS, et heureusement.)